DISCIPLINES

Théâtre

LE THÉÂTRE FRANCOPHONE EN ALBERTA

Le texte qui suit est essentiellement un résumé à vol d’oiseau avec quelques petits changements et mises-à-jour du livre, Godbout, Laurent; Ladouceur, Louise et Allaire, Gratien, Plus d’un siècle sur scène ! Histoire du théâtre francophone en Alberta de 1887 à 2008, L’Institut pour le patrimoine de la francophonie de l’Ouest canadien, Campus Saint-Jean, ©2012, 500 p. + DVD, qui est encore disponible chez l’éditeur, devenu IMELDA, Campus Saint-Jean, Edmonton, AB. Dans ce texte, il y aura forcément beaucoup d’omissions et peut-être des erreurs desquelles nous nous excusons.

1. Les débuts (18e siècle ? – 1913)

Il est fort probable qu’une activité théâtrale francophone existait en Alberta depuis la fin du dix-huitième siècle chez la population francophone et métisse à l’époque de la traite des fourrures, mais la première référence officielle à une telle activité se trouve dans l’Edmonton Bulletin du 23 juillet 1887. C’est une annonce d’un spectacle monté par le Club dramatique de la Société Saint-Jean Baptiste et les amateurs d’Edmonton. Dans ce même journal, on trouve des références à du théâtre en français présenté en 1889, 1891, 1892, 1894, 1897 et 1898 à Edmonton, Saint-Albert et Fort Saskatchewan par les Élèves des Fidèles Compagnes de Jésus, la Paroisse Saint-Joachim, les Élèves du Couvent de Saint-Albert et les Élèves du North Side School House de Fort Saskatchewan. Dans le sud de la province, le Calgary Tribune en mars1888 annonçait un « Concert de la Saint-Patrick » présenté par les Amateurs de Calgary, et en juillet et décembre 1892 plusieurs spectacles montés par les garçons et les filles du Couvent Sacré-Cœur de Calgary. L’Alberta Tribune annonçait en mai 1897 un spectacle monté par les Élèves du Couvent Sacré-Cœur de Calgary. Il est clair que ce sont des amateurs qui présentaient ces spectacles, mais ils ont dû néanmoins avoir une certaine envergure pour être mentionnés dans des journaux anglophones. Ajoutons que ce même genre d’activité théâtrale présentée par des élèves d’écoles, de couvents, de collèges et par des personnes dans des paroisses s’est continuée pendant presque toute l’histoire du théâtre francophone en Alberta. 

Avec l’avènement des journaux francophones, L’Ouest canadien (1898 – 1900), Le Courier de l’Ouest (1905 – 1916), Le Progrès ou Progrès albertain (1909 – 1915) et L’Étoile de Saint-Albert (1912 – 1914), nous avons une bien meilleure idée de l’activité théâtrale francophone en Alberta, mais même pendant un certain temps, entre 1900 et 1905, nous devons nous fier à ce qui a été rapporté dans les journaux anglophones d’Edmonton et de Calgary, notamment des spectacles à Beaumont et Calgary en 1900, à Beaumont en 1902, à Morinville en 1904 et à Edmonton et Morinville en 1905. À noter particulièrement en 1905 est la visite de Sarah Bernhardt et en 1906 de Mme Albani à Edmonton. En plus, la Troupe de Sarah Bernhardt a fait une tournée d’adieu à Edmonton en juin 1911 et le Théâtre Sarah Bernhardt qui comptait 25 acteurs a présenté un spectacle à Edmonton en janvier 1913. Cette ville avait donc assez de prestige pour attirer ces vedettes reconnues internationalement. Il est à remarquer aussi la présence de troupes plus formelles comme la Clara Mathes Company (1900), le Cercle Richelieu d’Edmonton (1905), la Société Saint-Jean Baptiste (1907), le Cercle dramatique de Saint-Albert (1908), le Cercle Jeanne d’Arc (1913) et le Cercle dramatique de Morinville et le Cercle Saint-Paul tous deux fondés en 1913. Le premier cercle dramatique fut pourtant retrouvé en 1898. C’est le Cercle dramatique français fondé sous la direction de M. [J.] Bilodeau qui est devenu le Cercle dramatique d’Edmonton qui a duré jusqu’en 1905. M. Émile Tessier a également fondé une troupe qui portait son nom et qui dura de 1908 à 1916.

L’historien, Edward John Hart maintien que le début de la Première Guerre mondiale (1914) marque l’apogée de la présence française à Edmonton. Effectivement, l’influence francophone commence à y diminuer, mais, au contraire, le théâtre semble prendre son essor partout dans la province. 

2. La floraison générale du théâtre (1913-1935)

Plusieurs facteurs ont contribué à l’épanouissement de l’activité théâtrale francophone pendant cette période. D’abord, le Collège des Jésuites (le Collège Saint-François-Xavier) fut établi à Edmonton et assura, au moins au début, la présentation de deux pièces par année, incluant parfois des pièces en anglais, et dont la troupe, Les Amateurs du Collège, monteront des spectacles jusqu’à la fermeture du Collège en 1942 (voir les années 1935 à 1945, ci-après). Les étudiants au Juniorat Saint-Jean, à Edmonton depuis 1910, présentaient aussi des pièces.  La troupe, Le Cercle Jeanne d’Arc, fut créée en 1913 et dura jusqu’en 1932 lorsqu’elle fut remplacée en 1933 par le Théâtre Français créé par des jeunes Canadiens-français, artistes dramatiques d’Edmonton avec les Bonnes Amies, présidée par Paul Jenvrin et dirigée par Laurier Picard. Ce dernier est un personnage important non seulement du théâtre de l’époque mais bien jusque dans les années 50 et qui nous a laissé de l’information au sujet de l’activité théâtrale particulièrement utile à cause de l’absence de sources journalistiques en français à certaines périodes. Effectivement, il n’y a pas de journal français en Alberta entre 1915 et 1917 et bien que le journal L’Union ait été publié entre novembre 1917 et novembre 1927, année où il a été remplacé par La Survivance, entre décembre 1919 et janvier 1927 toutes les copies de ce journal ont disparu mystérieusement sauf une seule, celle du 15 novembre 1923. Un autre personnage important à cette époque est Alphonse Hervieux. Il y a aussi les dramaturges, Marie-Louise Michelet (Magali), Georges Bugnet et Emma Morrier. Nous allons y revenir sous peu, mais auparavant voici une capsule de l’activité théâtrale en langue française qui est impressionnante puisqu’entre 1920 et 1926, les sources sont presqu’exclusivement les notes de Picard, mentionnées ci-dessus, L’Écho du Collège (publication du Collège des Jésuites) et les journaux anglophones d’Edmonton et de Calgary. Le nombre de spectacles présentés est indiqué entre parenthèses à chaque endroit.

Les activités théâtrales francophones sont les suivantes : en 1913, Edmonton (11), Morinville (4), Saint-Albert (2) et Saint-Paul (1) ; en 1914, Durlingville (2), Edmonton (18), Morinville (4), Saint-Albert (1) et Saint-Paul (1) ; en 1915, Edmonton (15), Morinville (1) et Saint-Paul (1) ; en 1916, Edmonton (16) et Saint-Paul (1) ; en 1917, Edmonton (9) et Morinville (1) ; en 1918, Edmonton (14) ; en 1919, Edmonton (11), Morinville (1) et Villeneuve (1). De 1920 à 1935 inclusivement, le nombre d’activités théâtrales en français retrouvés dans les journaux est 20 à Beaumont, 1 à Beauvallon, 21 à Bonnyville, 5 à Brosseau, 1 à Brosseau-Duvernay, 11 à Calgary, 2 à Chauvin, 1 à Cold Lake, 5 à Donnelly, 156 dont 5 au poste de radio CKUA et 1 à la radio CJCA à Edmonton, 17 à Falher, 7 à Fort Kent, 1 à Fort Saskatchewan, 1 à Guy, 1 à Lac-La-Biche, 1 à La Corey, 4 à Lafond, 23 à Lamoureux, 35 à Legal, 4 à McLennan, 31 à Morinville, 17 à Picardville, 2 à Plamondon, 12 à Saint-Albert, 1 à Saint-Charles, 11 à Saint-Édouard, 11 à Sainte-Lina, 14 à Saint-Paul, 1 à Saint-Paul des Métis, 14 à Saint-Vincent, 4 à Thérien, 3 à Vegreville, 4 à Villeneuve, 2 à Vimy et 1 à Whitelaw. Cela constitue 445 événements théâtraux à 33 endroits en 15 ans, souvent avec deux ou davantage de pièces par spectacle et ça n’inclut pas les pièces montées dans les écoles francophones, souvent deux fois par année, ni la plupart des concerts qui avaient lieu dans les paroisses francophones pour célébrer la Saint-Jean-Baptiste. Ça fait certainement contraste à ce que nous vivons de nos jours !

Il a été question plus tôt d’Alphonse Hervieux qui, sans oublier Laurier Picard, est une personne qui a été parmi les plus grands contributeurs à l’activité théâtrale en Alberta. Il a participé à la création du Cercle Jeanne d’Arc le 27 mars 1913 et il en fut le directeur dramatique pendant la plupart de son existence. Il était reconnu par la communauté francophone aussi bien qu’anglophone pour son excellence en tant qu’interprète et metteur en scène. En effet, sa fille, Gabrielle, et lui jouaient aussi pour le Edmonton Little Theatre, le Community Theatre et la Edmonton Civic Opera Company. Il dirigeait aussi les élèves de l’école Grandin en 1929 et c’est son épouse qui les dirigeait l’année suivante dans des pièces présentées dans la salle paroissiale de Saint-Joachim. 

Le Cercle Jeanne d’Arc est sûrement la troupe la plus prolifique pendant cette époque. Dès sa première année, elle présenta avec grand succès Les Crochets du père Martin jouée à Edmonton puis en tournée à Saint-Albert et Morinville, puis Les Deux orphelines qui ne semble pas avoir été présentée en tournée. En 1914 la troupe a présenté une comédie de Labiche, Les Vivacités du capitaine Tic pour ensuite rester silencieuse jusqu’en 1916 lorsqu’Alphonse Hervieux en prit la direction dramatique pour présenter Les Femmes qui pleurent, et jusqu’en 1919 : Silence dans les rangs, Les Petites accordailles, Durand et Durand, Le Roman d’un jeune homme pauvre, Le Voyage des Berluron, Le Gentilhomme pauvre et Un Peuple sans histoire. À cause de l’absence du journal L’Union pendant plusieurs années, il est difficile de dire précisément ce que le Cercle a fait, mais selon les notes de Laurier Picard (voir la note 2 ci-dessus), une soixantaine de pièces ont été jouées en français entre 1913 et 1932. Avec l’avènement de La Survivance en 1929, nous sommes assurés que cette troupe a présenté au moins cinq spectacles entre 1929 et 1932, dont La Marraine de Charley en 1929 à Falher.

Pourtant, la pièce et la troupe, il nous semble, qui sont les plus significatives à cette époque sont Bon sang ne ment pas présentée d’abord à l’école séparée d’Edmonton par la Société d’art dramatique de Saint-Joachim avec comme interprètes, entre autres, Alphonse Hervieux, son épouse et sa fille, Gabrielle. La pièce est importante pour deux raisons : 1) elle a été présentée au festival canadien d’art dramatique à Calgary en février 1935 en compétition avec 17 autres pièces, la seule en langue française, elle y gagna le premier prix et a représenté l’Alberta au troisième Dominion Drama Festival à Ottawa et a été jouée à plusieurs endroits pendant les années suivantes ; et 2) elle fut écrite par Emma Morrier, musicienne, chroniqueuse pour La Survivance sous le pseudonyme, Madrina, et peintre installée à Edmonton depuis 1932. En 1936, « … l’imprimerie La Survivance présente au public le premier ouvrage d’une Canadienne-française publié en Alberta, un recueil regroupant quatre pièces d’Emma Morrier : Bon sang ne ment pas, Va ton chemin, [appelée aussi Aime Dieu et va ton chemin], La trahison et Le rêve du poète. » 

Emma Morrier est une des trois dramaturges albertains de renom à cette époque. Les deux autres sont Marie-Louise Michelet dont le pseudonyme est Magali et Georges Bugnet. Magali était chroniqueuse pour le journal, Le Courier de L’Ouest entre 1906 et 1916. Elle a écrit les pièces, Jean Audrain présentée au concours de l’Alliance artistique de Montréal en 1917 et qui y a gagné le premier prix en 1918, puis Contre le flot qui a gagné le premier prix en 1921 dans le premier concours d’art dramatique institué par L’Action française. Georges Bugnet, horticulteur, écrivain, poète, journaliste, né en 1879 en France, s’est installé à Rich Valley en Alberta en 1905 et est décédé à Saint-Albert en 1981. Il a été rédacteur du journal, L’Union, entre 1924 et 1927, y a publié plusieurs romans et a écrit la pièce, La Défaite qui a remporté un prix au concours littéraire du Carnegie Trust Fund en 1934. Cette activité théâtrale francophone, imposante par sa diversité, sa fréquence et sa qualité indéniable, se maintient, quoiqu’un peu moins importante jusqu’au début de la Deuxième Guerre mondiale avec un déclin compréhensible pendant celle-ci. 

3. Les années de maintien (1935 – 1945)

L’histoire relevée dans cette section commence effectivement dans les années antérieures à 1935, mais elle raconte le prolongement du théâtre francophone en Alberta jusqu’en 1945. Deux éléments, croyons-nous, caractérisent cette période : Laurier Picard et la présence de troupes dites semi-professionnelles. Commençons par Laurier Picard qui a eu sa formation en art dramatique au Collège des Jésuites et à la University of Alberta à Edmonton. « Pendant sa jeunesse, Picard jouait avec le Cercle dramatique Jeanne d’Arc et il participa à la création du Théâtre Français en 1933 à Edmonton. Il joua avec cette troupe et en fut le directeur artistique pendant plusieurs années. Entre 1934 et 1956, elle a présenté au-delà de cinquante pièces, aussi bien classiques qu’originales. Le Théâtre Français présentait aussi des productions en tournée dans les communautés francophones partout en Alberta, … Picard était reconnu comme interprète exceptionnel et il jouait dans les troupes de théâtre anglophones et francophones. Il adorait The Edmonton Civic Opera et, pendant des années, il a contribué à cette troupe en tant qu’interprète/chanteur et metteur en scène dans plus de quarante-six productions incluant de l’opéra classique et des comédies musicales modernes. » Picard a aussi joué pour le Edmonton Little/Community Theatre avec Joseph Shocter, le fondateur du Edmonton Citadel Theatre, mais c’est sa création et sa participation en tant qu’interprète, metteur en scène et directeur artistique du Théâtre Français qui nous intéresse particulièrement. Nous y reviendrons.

D’abord notons les nombreuses présentations qu’ont données la troupe Les Anciens du Collège [des Jésuites] qui se joignait au Cercle des Bonnes Amies composé de jeunes femmes et fondé en 1926. Les Anciens du Collège ont présenté leurs pièces entre 1927 et 1941, sauf entre 1934 et 1939, peut-être en raison d’un manque financier dû à la grande dépression en 1929. Parmi ces pièces on retrouve Interruption d’Ernest Dion, La Trahison du haut-parleur de Pierre Dumaine, Le Moulin du chat qui fume et La Dernière farce de Marfailloux toutes deux de LeRoy-Villars, Un Chapeau de paille d’Italie de Labiche, Les Boulinard de Maurice Ordonneau, Le Procureur Hallers de Paul Lindau, Fifille de son père de René Bastien. La Meilleure part de Julien Richer, Les Deux canards de Tristan Bernard et Alfred Athis, La Fleur d’oranger de Birabeau et Dolly de Noël Francès. Ces pièces, la plupart étant des comédies, ont été jouées à Edmonton, mais certaines ont été présentées en tournée à Morinville, Legal, Lamoureux et Calgary. En plus, en 1932, les Anciens ont fait une tournée entre mai et la fin août à Villeneuve, Calgary, Beaumont, Lafond, Saint-Édouard, Brosseau, Plamondon, Lac-la-Biche, Saint-Vincent, Saint-Paul, Fort Kent, Bonnyville, Morinville, Vimy, Saint-Albert et Legal. Les noms des interprètes dont La Survivance a souvent fait l’éloge sont : Laurier Picard (souvent metteur-en-scène aussi), Jacques Jenvrin, Gérard St-Germain, Gérard Baril, Léo Belhumeur, Wilfrid Boivert, Paul Côté, le Dr J.-L. Petitclerc, Charles Turgeon, Philippe Villeneuve, René LeBlanc, Alphonse Hervieux, André Déchène, Émile Brière, P. Châtain, Rodolphe Belhumeur, Guy Boileau, Joseph Fouquette, Claude Galibois, Clément Gaudet, Aubin Grenier, Laurent Primeau, Georges Robin, Paul Théroux et du Cercle des Bonnes Amies, Germaine Lambert, Yvette Lemieux, Gertrude McNeil, Gabrielle Mercier, Bernadette Lachance, Mme A. Morin, Mlle H. Gant, Mlle G. Bastide, Mlle L. Côté, Madeleine Jenvrin, Mme G. Lambert, Mlle E. Normandeau, Jacqueline St-Jean, Eleonor St-Germain, Judith Bouchard, Thérèse Vallée, Gabrielle Hervieux et Mme Laurier Picard. Enfin, les pièces ont été présentées la plupart du temps avec de la musique et du chant, par exemple, « l’orchestre Martin, ainsi que Mme A.-E. Rocque et Jeanne Royal accompagnée par Mme J. Nadeau et par Marie-Alice Pépin. » 

Nous avons parlé plus tôt de la troupe, le Théâtre Français, fondée en 1933 et dirigée par Laurier Picard et à laquelle coopérait Alphonse Hervieux et dont le but était « de mettre en valeur les pièces faites par nos écrivains albertains pour les Concours Littéraires du ‘Carnegie Trust Fund’ et si l’une d’elle remporte la palme de la présenter au festival d’Ottawa. »  Lors de sa première année, le Théâtre Français a présenté trois spectacles : Nos Intimes arrangée d’après celle de Victorien Sardou en juin ; Les Suites du premier lit d’Eugène Labiche et Les Trois masques de Carles Méré en novembre ; et Le Grillon du foyer inspiré du conte de Charles Dickens, The Cricket of the Hearth, en décembre. Le spectacle de novembre a aussi été présenté en tournée à Morinville. Nous retrouvons dans les distributions de ces pièces la plupart des noms énoncés dans la section portant sur Les Anciens du Collège. En avril 1934, le Théâtre Français a présenté deux pièces, la première, La Défaite de Georges Bugnet, présentée à la radio CKUA et la deuxième, Exovede, une pièce en anglais de D’arcy Marsh sur la scène du Masonic Temple d’Edmonton. En juin, La Délivrance de Pierre Dumaine, mise-en scène par Alphonse Hervieux a été présentée à la Paroisse Saint-Joachim. Le 10 avril 1935, La Survivance a annoncé la dissolution du Théâtre Français, mais selon les notes de Laurier Picard (voir la note 2 ci-dessus) cette troupe a continué, de 1933 jusqu’au milieu des années 1950, à présenter au moins une pièce par année.

Une raison probable de la supposée dissolution du Théâtre Français est la nouvelle importance acquise par la Société d’Art Dramatique de Saint-Joachim (devenue le Cercle dramatique de Saint-Joachim en 1935) dont nous avons parlé plus tôt avec la pièce d’Emma Morrier, Bon sang ne ment pas présentée à Edmonton en octobre 1934, ensuite, grâce à beaucoup de commanditaires et une campagne de levée de fonds organisée par La Survivance, à Calgary en février 1935 et enfin à Ottawa en avril 1935. Le Cercle a présenté deux pièces en novembre 1935 à Edmonton, ensuite à Saint-Vincent, Saint-Paul et Beaumont, puis à Lamoureux en mars 1936. Il a présenté aussi une opérette, Quand on conspire, en février 1936 et, en avril 1936, deux comédies à Morinville. Au début 1937, le Cercle se préparait à présenter le 2e acte de Le Cœur décide de Ferrier Courdon pour le festival provincial de théâtre du 18 au 20 mars 1937. Le Cercle a peut-être présenté trois comédies avec Alphonse Hervieux et Laurier Picard pour la Saint-Jean-Baptiste en 1940 à Saint-Joachim, mais il est incertain quelle troupe a joué ces pièces.

Une autre de ces troupes soi-disant semi-professionnelles de l’époque est le Cercle dramatique Molière (à ne pas confondre avec le Cercle Molière de Saint-Boniface, MB), fondé à la fin février 1936 et dont Laurier Picard était le directeur. Le Cercle dramatique Molière est associé à un drame d’Erckmann-Chatrian, car il a joué le 2e acte de cette pièce le 27 mars 1936 et a gagné le premier prix au premier festival dramatique organisé par l’Edmonton Little Theatre pour ensuite le présenter au festival provincial à Calgary du 18 au 20 mars 1937. Également en 1937, le Cercle a présenté La Couvée en février, Cocktail d’Yvette O. Mercier-Gouin en mars et La Séparation d’Henriette Charasson en avril. Il a aussi présenté en avril La Séparation et La Couvée à Legal, puis à Saint-Paul le 29 mai. Pour la Saint-Jean-Baptiste à la paroisse Immaculée-Conception, le Cercle a joué Les Vivacités du Capitaine Tic avec tellement de succès qu’il l’a reprise à Edmonton le 17 octobre, à Legal le 27 octobre et à Morinville le 7 novembre. Le 12 décembre la troupe a présenté Les Tartempion, une comédie d’A.-C. de la Lande à Edmonton. Le Cercle dramatique Molière a poursuivi ses activités en 1938 avec La Séparation, présentée à l’Université de l’Alberta à Edmonton le 8 janvier. La Trahison d’Emma Morrier et Madame Latour voyage à un sou du mille de Mme P.-E. Poirier ont été jouées dans la nouvelle salle paroissiale de Saint-Joachim le 3 avril, puis au même endroit le 26 juin, pour la Saint-Jean-Baptiste, le Cercle a présenté Cœur blessé. Le drame de Charles Méré, Les Trois masques, sous la direction de Laurier Picard avec les interprètes Fanning Boileau, André Déchène, Alphonse Hervieux, son épouse, sa fille Gabrielle, son fils Paul et Gérard St-Germain, a d’abord été présenté par le Cercle à Edmonton en décembre 1938, puis au festival provincial à Calgary à la fin février 1939 où il n’a pas gagné de prix, mais a été invité à participer au Dominion Drama Festival, qui a eu lieu à Londres, Ontario, où la troupe l’a présenté le 10 avril 1939, encore sans gagner de prix. En plus, le Cercle a présenté Le Voyage de M. Perrichon, une comédie, le 12 février 1939 pour la jeunesse et le 13 février 1939 pour le grand public. Le 22 juin 1939, le Cercle a présenté au Strand Theatre une autre comédie, Les Gens nerveux, pour la Saint-Jean-Baptiste et deux jours plus tard à Saint-Paul, puis à Vimy le 10 juillet 1939. Selon La Survivances et les notes de Picard, le Cercle dramatique Molière a présenté 25 spectacles entre le 29 janvier 1936 et sa fin en juillet 1939. En moyenne, six spectacles par année, ce n’est pas peu dire ! 

Peut-être que la guerre a contribué à la dissolution de ces troupes semi-professionnelles, mais l’activité théâtrale a persisté pendant les années 40 à 45. Ce sont les élèves du Juniorat Saint-Jean, du Couvent de l’Assomption, du Collège des Franciscains, le Cercle Français de l’Université et des groupes dans une multitude d’endroits, de paroisses et quelques écoles qui ont assuré sa continuation partout en Alberta. À titre d’exemple, en 1940 il y eut un spectacle à chacun de Bonnyville, Chauvin, Guy, La Corey, Lamoureux, Legal, Mallaig, Saint-Paul, Lamoureux et quatre à Edmonton ; et en 1941, il y eut un spectacle à La Corey et Legal et quatre à Edmonton. Souvent, il y a eu des présentations lors de moments de célébration, notamment pour la Saint-Jean-Baptiste et parfois la Sainte Catherine. Clairement, l’année 1945 fut la plus maigre à cet égard parce que seulement deux spectacles ont été retrouvés, un à Edmonton et un à Lamoureux.

4. En voie de reprise (1945-1960)

Pendant plusieurs années après la fin de la guerre, il y eut une période d’incertitude, notamment ce que l’on a appelé « la guerre froide ». L’économie albertaine, néanmoins, a pris un bond remarquable après la découverte de pétrole à Leduc en 1947 et à Redwater en 1948, quand Drayton Valley est devenu un centre de l’industrie pétrolière en 1953 et lorsqu’il y a eu un développement plus accentué des sables bitumineux à Fort McMurray. Cette nouvelle aisance et une plus forte immigration de Québécois à Edmonton et de Français à Calgary a sûrement joué un rôle dans la multiplication d’activités théâtrales francophones à cette période. La construction entre 1955 et 1957 des auditoriums du jubilé à Edmonton et à Calgary a aussi été importante pour rendre plus visibles et attrayants les arts de la scène.

Dans La Survivance nous lisons que Le Chauffeur a été joué à Calgary le 26 novembre 1947 « par un groupe de messieurs et dames de langue française dirigé par J.-D. Caron », il y a eu un festival dramatique le 17 avril 1948 et Le Triomphe de la médecine fut présentée par les Élèves de l’Université [de Calgary] le 4 février 1956, mais il n’y a eu peu de théâtre francophone dans le sud de l’Alberta avant les années 1970, du moins si nous nous fions au seul journal francophone qui se trouve à Edmonton et serait probablement plus apte à rapporter ce qui se passe au Nord qu’au Sud. Sans compter Edmonton, c’est la région de Saint-Paul et Bonnyville qui remporte la palme du nombre d’activités théâtrales pendant cette période avec treize spectacles entre 1946 et 1954. Le Cercle dramatique de Saint-Paul, fondé en 1955, a ajouté à ce nombre six pièces présentées entre 1955 et 1960, sans compter deux spectacles présentés par le Cercle Molière de Saint-Boniface en tournée en 1959 et un en 1960. En parlant de tournées, il y a eu plusieurs échanges d’activités théâtrales entre Fort Kent, Mallaig, Sainte-Lina, Saint-Paul et Saint-Vincent et des présentations par une troupe théâtrale de l’Est, les élèves du Collège Saint-Jean et l’Union théâtrale de Montréal. Entre 1945 et 1960 il y eut 10 spectacles à McLennan, 8 à Beaumont et Falher, 7 à Saint-Édouard, 6 à Legal, 5 à Tangent, 4 à Fort Kent et Morinville, 3 à Lamoureux, Mallaig, Marie-Reine, Sainte-Lina, Saint-Vincent et Vimy, 2 à Donnelly, Girouxville, Jean-Côté et Joussard et 1 à Cluny, Cold Lake, Grand Centre, Guy, Jarvie, Plamondon, Rivière-La-Paix, Saint-Albert et Saint-Isidore.

À Edmonton pendant cette période, beaucoup de spectacles ont été présentés par le Juniorat, devenu, Collège Saint-Jean en 1947 et quelques-uns par le Pensionnat de l’Assomption et les Élèves de l’Université [de l’Alberta], mais la plupart du temps ce sont des groupes éphémères, des écoles ou des paroisses qui les ont produits. Sans compter les pièces présentées par des troupes en tournée ou celles à la radio, il y eut à Edmonton un spectacle en 1945, 5 en 1946, 3 en 1947, 3 en 1948, 2 en 1949, 5 en 1950, 6 en 1951, 5 en 1952, 6 en 1953, 3 en 1954 et 1955, 4 en 1956 et 1957, 1 en 1958, 2 en 1959 et 4 en 1960. Plusieurs de ceux-ci étaient pour célébrer la Saint-Jean-Baptiste.

Il y a eu, en plus, 3 spectacles présentés lors du Festival de la jeunesse catholique du 23 au 25 avril 1947 et trois autres lors du Festival dramatique des jeunes du 17 au 20 mai 1948. Au Festival national qui a eu lieu à l’auditorium du jubilé d’Edmonton du 20 au 25 mai 1957, les troupes, le Théâtre de Quat’ Sous de Montréal et l’Union Théâtrale de Sherbrooke ont présenté des pièces. En 1958, le Théâtre du Nouveau Monde (de Montréal) a présenté trois pièces de Molière, en 1959 le Collège Notre-Dame de Falher a joué une pièce à Edmonton et le Cercle Molière de Saint-Boniface en a joué trois. Enfin, le Cercle Molière de Saint-Boniface en a joué une autre en 1960. Ajoutons que ces troupes en tournée jouaient aussi devant des auditoires ailleurs en province, tels ceux à Saint-Paul, dans la région de Rivière-La-Paix, à Legal, Morinville et Beaumont.

Le Poste CHFA fut fondé en 1949 et, grâce surtout à Léo Rémillard et Laurier Picard, il a diffusé plusieurs pièces jouées par des Albertain.e.s en plus de celles qui provenaient de Montréal. Il y eut donc 12 pièces interprétées par des Albertain.e.s diffusées en 1951, 8 en 1952, 12 en 1953 et une en 1957.

Nous ne pouvons pas terminer cette section sans parler des Père Forcade et Père Mercure, tous deux Oblats de Maire-Immaculée. Le Père Forcade était professeur d’art dramatique au Collège Saint-Jean et a dirigé des pièces qui y ont été présentés avec, comme interprètes, les étudiants du Collège et, souvent, les étudiantes du Couvent de l’Assomption. N’oublions pas non plus les spectacles à grand déploiement, surtout historique ou religieux, montés par le Père Mercure. C’est lui, en plus, qui a dirigé la comédie de Molière, Le Malade imaginaire, jouée avec grand succès par les Élèves du Collège Saint-Jean et les Normaliennes [de l’Université de l’Alberta] le 3 avril 1955.

En somme, il est clair que, surtout dans le Nord de l’Alberta, il y a eu beaucoup d’activité théâtrale francophone pendant ces années, mais dans la prochaine section nous serons témoins d’une vague dans ce domaine qui semble croître d’année en année.

5. Un flux d’activité théâtrale francophone (1960-1992)

Les activités théâtrales décrites dans cette section dépassent parfois 1992, mais cette année est significative parce qu’elle marque la naissance de L’UniThéâtre à Edmonton.

Un nom bien connu par les amateurs de théâtre au début des années 1960 à Edmonton est Réginald Bigras. Originaire de Hull, Québec, Réginald était inscrit au Baccalauréat ès Arts au Collège Saint-Jean. Il créa la troupe Les Collégiens Comédiens qu’il a dirigé pendant toute la durée de cette troupe et dont les interprètes étaient surtout des étudiants du Collège et des étudiantes, récemment admises au Collège, de même que celles de l’Académie de l’Assomption. En 1963 et 1964, Les Collégiens Comédiens ont présenté L’Avare de Molière, La Maison du printemps de Millau, La Poudre aux yeux de Labiche, Les Précieuses ridicules de Molière, La Farce du cuvier, texte anonyme du XVe siècle et Les Irascibles de Chancerel. Dans la troupe, une des interprètes, Louise Rousseau, était la fille de Paul Châtain, ancien membre du Théâtre Français créé par Laurier Picard et qui était encore son trésorier. Puisque Réginald voulait monter une pièce pour le 100e anniversaire du Canada, Paul lui a dit que s’il reprenait le nom de sa troupe, il lui transférerait le 400$ que le Théâtre Français avait encore en banque. Ainsi est né le Théâtre Français d’Edmonton, troupe incorporée en 1969, grâce à Me Louis Desrochers qui lui a obtenu un octroi de 15 000$ du Secrétariat d’État du Canada. Nous y reviendrons. La pièce que Réginald a montée pour le centenaire du Canada était L’Auberge des mort subites de Félix Leclerc. Elle a été jouée à l’auditorium du Collège Saint-Jean avec grand succès les 24 au 26 février 1967, puis ensuite en tournée à Beaumont, Hinton, Legal, Saint-Paul et Falher pour être présentée de nouveau à Edmonton après cette tournée.

Une autre personne très importante dans le milieu théâtral des 1960 et dont la renommée et la contribution à celui-ci n’a fait qu’accroître depuis est France Levasseur (ultérieurement, Levasseur-Ouimet). Elle a fondé la troupe, Le Rideau Rouge, pour initier les étudiant.e.s du Collège aux fondements du théâtre. En 1967, cette troupe a joué Les Jours heureux, en 1968, La Poudre aux yeux, Un Caprice et La Visite à l’Hôpital, puis a rejoint Les Collégiens Comédiens dans le nouveau Théâtre Français d’Edmonton (dorénavant, le TFE).

En novembre 1967, le TFE présente la pièce, Le Journal d’Anne Frank, sous la direction de Jean Fortier, O.M.I. Pour la saison 1968-1969, le TFE présente Asmodée et Au p’tit bonheur. En mars 1970, il présente Boeing-Boeing dans une mise en scène de France. 

En août 1970, Julien Forcier devient le premier directeur artistique rémunéré du TFE et pendant son mandat de septembre 1970 à juin 1973, le TFE produit des saisons complètes avec de cinq à huit spectacles par saison, habituellement, une comédie, une pièce policière, un drame, une œuvre contemporaine, une pièce pour enfants et, à l’occasion, une création collective, en plus de tournées à Saint-Paul, Calgary, Bonnyville, Falher et North Battleford, Saskatchewan. Le TFE avait également une secrétaire rémunérée, mais le directeur technique ne fut rémunéré qu’après 1975. Parmi les grands succès sous la direction de Julien, il y eut Fragments de Chisgall, mise en scène par Laurent Godbout, la pièce La Sagouine jouée par Viola Léger devant son auteure, Antonine Maillet en février/début mars 1973 et Le Malade imaginaire avec grand déploiement à la fin mars et le 1er avril 1973.

France Levasseur était la directrice artistique du TFE en 1973-74, Jean Fortier, O.M.I., en 1974-75, Claire Ifrane en 1975-77, Ève Marie en 1977-79, Pierre Bokor 1979-88 et Julien Forcier de nouveau de 1988-91. Pendant la saison 1991-92, le Conseil d’administration du TFE payait des metteurs en scène pigistes. Tous les spectacles étaient présentés dans le théâtre du Collège/Faculté Saint-Jean sauf quelques-uns au théâtre Rice du Citadel Theatre en 1977-79. Durant toutes ces années, le TFE présentait au moins quatre spectacles par année avec parfois deux pièces par spectacle et une pièce pour enfants en plus de nombreuses tournées en Alberta à Calgary, Falher, Rivière-La-Paix, Bonnyville et Saint-Paul ainsi qu’en Europe en 1986 à Berlin, Metz, Paris et Luxembourg. Entre autres interprètes devenus célèbres à cette époque et ultérieurement, il y a Gérard Guénette et André Roy. Entre 1982 et 1987, le TFE était l’hôte d’un festival annuel de théâtre francophone au printemps pendant lequel le TFE tenait des ateliers sur le jeu théâtral et sa technique. Ont participé à ce festival, certaines troupes plusieurs fois, le Théâtre de la Seizième de Vancouver, l’Uni-Théâtre de Saskatoon, la Troupe du Jour de Saskatoon, Théâtre Repère de Québec, le Collège Mathieu de Gravelbourg, Saskatchewan, le Cercle dramatique La Débâcle de Rivière-La-Paix, la Troupe de Pierrot de Red Deer, Tréteaux des Rocheuses de Calgary, les Vie-la-Joie de Legal, le Cercle dramatique des Quatre Cantons de Mallaig, le Théâtre de Chez-Nous de Saint-Paul, le Cercle Dramatique de Saint-Paul, la Troupe des Bonnyvillois, la troupe de l’École Notre-Dame de Bonnyville, la Troupe de l’école J.H. Picard d’Edmonton, le Théâtre à la Carte, Les Baladins d’Edmonton, la Société de Théâtre de Calgary, Théâtre de l’Alliance française de Calgary, La Société Alda Côté d’Edmonton, la Troupe étudiante de la Faculté Saint-Jean, La Troupe d’Edmonton, le Studio du TFE et le TFE. En ce qui concerne le théâtre pour les jeunes, plutôt que de faire des tournées dans les écoles, Pierre Bokor a décidé d’inviter les écoles au théâtre de la Faculté Saint-Jean où le TFE a présenté annuellement à une variété d’écoles des pièces pour jeune public de 1982 à 1985 et en 1987 et 1988. Pendant qu’il était au TFE, Pierre Bokor a aussi créé et dirigé la troupe, le Théâtre à la Carte (TALC), composée surtout des étudiant.e.s de la Faculté Saint-Jean. Cette troupe a présenté plus de 43 productions, souvent avec deux pièces par spectacle, entre 1980 et 1994 et a fait plusieurs tournées en province. Elle a aussi présenté En pièces détachées de Michel Tremblay à Alès, France, le 22 janvier 1986 en tant qu’invité spécial au festival théâtral européen. C’est Doris-Michel Montpetit qui a assumé la tâche de directeur artistique du TALC de 1989 à 1991 en l’absence de Pierre qui a repris la direction de 1991 à 1994.

Les écoles d’immersion en français ayant pris naissance en 1976, Suzette Lagacé-Aubain, en 1978, alors directrice administrative du TFE, a fondé et a dirigé jusqu’en 1983 la troupe professionnelle, Boîte à Popicos, qui s’est initialement fixé comme objectif d’aider les élèves au primaire des écoles d’immersion dans l’apprentissage du français. La troupe était parrainé par Canadian Parents for French et soutenue et équipée par l’Edmonton Public School Board. Lors de sa première saison, 1978-79, la troupe a présenté des spectacles dans toutes les écoles d’immersion à Edmonton, Calgary, Beaumont et Saint-Albert. Ces tournées provinciales avec trois à cinq pièces ont eu lieu de 1978 à 1991 avec des tournées en Saskatchewan et au Manitoba en 1982 et en Colombie-Britannique en 1983. En principe, quelques semaines avant la présentation d’un spectacle dans une école, on y donnait des ateliers préparatoires avec du matériel didactique et un cahier pour chaque élève pour développer leur vocabulaire en français (avec des casse-tête, mots croisés, etc.) et les familiariser avec le contenu du spectacle. On présentait souvent des créations collectives, mais il y a eu aussi des pièces écrites par Suzette Lagacé-Aubin, Marie-Francine Hébert et Laurier Gareau. La troupe n’avait pas d’espace fixe avant 1983 lorsqu’elle a aménagé en lieu théâtral l’ancienne église de la Paroisse Saint-Thomas devenue propriété de l’Université l’Alberta et située sur le terrain de la Faculté Saint-Jean. En 1985, la Boîte à Popicos est devenue une société et a commencé à présenter du théâtre communautaire. On y a invité en 1985 des troupes de Calgary, Montréal et du Nouvel-Ontario, en 1986 on y a présenté Marche, Laura Secord de Claude Roussin, en 1987 Si la 91e m’était contée de Suzanne Schmouth, en 1988 une adaptation par Claude Binet du Petit Prince de Saint-Exupéry, en 1989 Les Bouffons et en 1990 une adaptation par Michel Garneau de La Vie après le hockey de Kenneth Brown, jouée par André Roy et Il était une fois Delmas… mais pas deux fois d’André Roy et Claude Binet, également jouée par André Roy. La troupe a organisé des festivals de théâtre jeunesse de l’Alberta pour les élèves de la 7e à la 12e année. Ces festivals ont eu lieu en mai 1990, en mai et juin 1991 pour les élèves de la 7e à la 9e années et en mai 1992. Enfin, la Boîte à Popicos s’est liée au TFE en février 1992 pour présenter un spectacle pour enfants, Une faim de loup de François Tardif, au théâtre de la Faculté Saint-Jean. Ajoutons que le TFE et la Boîte à Popicos ont souvent présenté des pièces au festival Fringe à Edmonton pendant les années 1980.

En plus de ses propres spectacles et ses répétitions durant sa saison théâtrale, la Boîte à Popicos accueillait dans ses locaux pour la « fièvre du vendredi » la Ligue locale d’improvisation fondée en novembre 1984. D’autres ligues d’improvisation se formèrent à Calgary et Lethbridge, il y avait des compétions entre celles-ci et on a mis sur pied des camps d’entraînement et des ateliers d’improvisation. En 1987, on prévoyait 3 000 spectateurs pendant la saison de la ligue et le vendredi, 20 mars 1987, l’équipe des Radico-Tralalas remportait la Coupe Popicos, puis le 21 mars 1987 elle devait affronter la meilleure équipe de Calgary. En novembre 1991, la ligue s’est restructurée pour réduire de 6 à 4 ses équipes en compétition et elle a commencé à présenter ses « parties » dans l’ancienne chapelle du (Collège) Saint-Jean, mais elle s’est bientôt effritée probablement à cause de l’essoufflement de ses joueurs et de ses partisans.

Une autre troupe de théâtre pour jeune public à cette époque était le Théâtre du Coyote fondée en 1985 par Gisèle Lemire. C’est Manon Beaudoin qui l’a dirigé de 1987 à 1994. La troupe s’affichait bilingue et elle présentait surtout des spectacles de bouffonnerie. Elle faisait des tournées dans les écoles de l’Ouest et participait à des festivals de théâtre jeunesse, par exemple le Edmonton’s International Children’s Festival où Lorna Thomas et Manon Beaudoin ont présenté la création Le Circus de Bop et Zézelle en mai 1989. Le dernier spectacle du Théâtre du Coyote fut La Maison rouge de Manon Beaudoin présenté au théâtre de la Cité francophone à Edmonton en juin 1997.

Pendant cette période, il y a eu aussi du théâtre à Calgary. Nous avons déjà parlé de sa troupe d’improvisation et la « fièvre du vendredi », mais il y a aussi eu des spectacles présentés par Les Tréteaux des Rocheuses en 1976, 1977, 1978 et 1979 ; par l’Université de Calgary en 1977, 1978 et 1979 ; par l’Alliance française de Calgary en 1980, 1981 et 1991 ; deux pièces de Christine Dimitriu Van Saanen en 1985 ; et une pièce pour enfants du Théâtre Quest en 1992. Le public francophone de Calgary a pu aussi bénéficier des tournées suivantes : le Théâtre de Chez-Nous de Saint-Paul en 1978, deux spectacles du Centre national des Arts d’Ottawa en 1978, deux spectacles de la Boîte à Popicos en 1979 et 1991 et un en 1981, 1982 et 1987, le Théâtre d’la Corvée d’Ottawa en 1981, le Cercle Molière de Saint-Boniface en 1981 et 2 pièces pour enfants en 1992, le Théâtre Parminou de Victoriaville en 1985, le Théâtre du Grand Cercle de Saint-Boniface en 1991, le Théâtre des confettis du Québec en 1991, la Troupe du Studio Classique de Paris en 1991, deux pièces pour enfants par la Troupe du Jour de Saskatoon en 1991, la troupe la Cinquième Saison de la France en 1992 et le TFE en 1973, 1977, 1983, et 1990. La troupe la Société de Théâtre de Calgary (STC) a probablement été créée en 1983 et sa troupe associée, le Théâtre des Avant-Cimes (TAC) en 1987. La directrice artistique de la STC de 1983 à 1987 était Michèle Lehardy et Gérard Guénette en fut le directeur artistique de 1987 à 1991. La STC a présenté son premier spectacle en novembre 1983, deux en 1984, trois en 1985 et 1986, quatre en 1987, un en 1988, 1989 et 1990, deux en1991 et un en 1992. Le TAC pour sa part a présenté un spectacle en 1987, deux en 1988 et 1989, trois en 1990, deux en 1991 et 3 en 1992. Il y eut également le Festival international des enfants du 27 mai au 1er juin 1991. Ça fait soixante-dix spectacles, incluant les pièces pour enfants, en 17 ans, donc en moyenne plus de quatre représentations théâtrales francophones par année entre 1976 et 1992.

Fondée en 1955 sous la direction de Mme Alphonsine Gouin, le Cercle Dramatique de Saint-Paul (CDSP), déjà mentionné dans la partie 5, a publié un cahier de 45 pages pour célébrer son 25e anniversaire. On y trouve les descriptions, incluant des photos des interprètes, etc., de 22 pièces présentées jusqu’en 1980. Le CDSP a aussi organisé un festival de théâtre pour les élèves des écoles de Saint-Paul et des alentours pendant lequel il y eut 16 représentations en1978, 9 en 1979, 14 en 1980 et 8 en 1983. Ce festival a donnée naissance à la troupe, Théâtre des Alentours, et sous l’égide des aînées une jeune troupe, Théâtre de Chez-Nous. Nous avons déjà mentionné le Festival francophone de l’Alberta organisé par le TFE entre 1981 et 1987 dans lequel le CDSP et le Théâtre de Chez-Nous ont présenté un spectacle chacun. En plus, le CDSP a présenté à Saint-Paul avec quelques tournées, 1 spectacle en 1981, 1983 et 1984, 2 en 1991 et 1en 1992. Le public de Saint-Paul et des alentours a aussi reçu en tournée le Cercle Molière de Saint-Boniface en 1960 et 1979, le TFE en 1970, 1971 avec deux spectacle, 1972, 1974, 1978 et 1980, la Boîte à Popicos en 1981, 1982 et 1991, le Théâtre d’la Corvée d’Ottawa en 1981, le Théâtre Parminou de Victoriaville en 1985, La Franco-Gang de Plamondon en1990 et le Théâtre de la Seizième de Vancouver en 1991 et 1992. C’est beaucoup de théâtre qui illustre bien l’engagement de beaucoup de bénévoles.  

En plus de la profusion des spectacles à Calgary, Edmonton et Saint-Paul, il ne faudrait pas oublier qu’il y a eu entre 1960 et 1992, y compris les tournées et le théâtre pour jeunes, des activités théâtrales francophones à Beaumont (9), Bonnyville (22), Cochrane (2), Donnelly (10), Falher (27), Fort Kent (1), Fort McMurray (5), Girouxville (8), Grande Prairie (1), High Prairie (1), Hinton (1), Jean-Côté (3), Lac-La-Biche (1), Legal (6), Lethbridge (8), Mallaig (7), Marie-Reine (6), McClennan (1), Morinville (18), Picardville (1), Plamondon (14), Red Deer (2), Rivière-La-Paix (15), Spruce Grove (2), St-Albert (8), St-Édouard (2), Ste-Lina (1), St-Isidore (11), St-Vincent (3), Tangent (1), Thérien (1), Vimy (1) et Yellowknife (1). Ça fait un total de 200 représentations souvent de 2 pièces et à l’occasion de 3 pièces.

Vu que la Boîte à Popicos a commencé à présenter des spectacles communautaires, elle recevait une subvention du Secrétariat d’État du Canada qui, en 1991, a décidé qu’il ne voulait plus subventionner deux troupes (le TFE et la Boîte à Popicos) qui desservaient essentiellement un même public. En plus, il y avait plusieurs autres troupes communautaires à Edmonton, notamment La Marée Montante (la troupe acadienne), Toutourien, 2 Plus 1 et le TALC en plus de l’autre troupe professionnelle, le Théâtre du Coyote, et il aurait pu y avoir davantage de collaboration entre elles. On a donc créé un comité, composé de deux représentant.e.s de ces troupes, un de l’ACFA et une représentante du Secrétariat d’État, qui avait comme but d’étudier la situation théâtrale à Edmonton et d’y apporter une certaine cohésion. Après plusieurs rencontres avec des discussions plutôt intenses, ce comité, avec l’accord des représentant.e.s, a proposé la fusion du TFE et de la Boîte à Popicos pour créer en juin 1992 une troupe de théâtre professionnel, L’UniThéâtre, qui avait le mandat d’une troupe de théâtre professionnel qui devait présenter du théâtre pour adultes et pour jeune public, sans négliger le théâtre communautaire et les tournées.

6. Le début d’une marée en décroissance (1992 – 2022)

William Shakespeare, dans sa pièce Jules César, nous dit « Il y a une marée dans les affaires des hommes … ». Ce phénomène se manifeste bien dans toute l’histoire du théâtre d’expression français en Alberta : après une grande activité il s’ensuit un ralentissement progressif. C’est bien ce qui se passe pendant cette période, même si la marée se retire très lentement.

D’abord, notons la disparition de quelques troupes, notamment : 2 Plus 1, La Marée Montante et Toutourien à Edmonton, La Troupe à Pierrot à Red Deer, Les Vie-La-Joie de Legal, La Débâcle de Rivière-La-Paix, le Cercle Dramatiques des Quatre Cantons de Mallaig, le Théâtre de Chez-Nous et le Théâtre des Alentours de Saint-Paul. En 1989, une troupe, Les Sacripans, avait été créée issue de la ligue d’improvisation à Bonnyville, mais elle n’a pas duré très longtemps. En effet, elle a présenté une soirée d’improvisation à Bonnyville le 27 janvier 1989 suivie d’une présentation semblable à Plamondon le 24 avril 1989. Elle a ensuite présenté des pièces à Bonnyville en juin 1993, en février 1994, en avril/mai 1995 et en mai 1996, puis elle aussi a disparu. Nous avons déjà dit que le Théâtre du Coyote a présenté son dernier spectacle en 1997. Le Théâtre à la Carte a continué son activité après 1992 en présentant 2 spectacles à Edmonton en 1993, 3 à Edmonton et 1 à Bucarest, Roumanie, en 1994, 3 à Edmonton en 1995, 1 à Compiègne, France, et 1 à Edmonton en 1996, 2 à Edmonton en 1997, 3 à Edmonton un desquels fut en collaboration avec L’UniThéâtre en 1998 et un dernier à Edmonton en 1999.

Le Cercle dramatique de Saint-Paul (CDSP) a continué son activité théâtrale après 1991 en présentant à Saint-Paul un spectacle en 1992, 1993, 1996, 1998, 2000, 2001, 2002 et deux en 2003. Sauf des collaborations avec la Société des Blés d’Or dans deux spectacles en 2002 et peut-être ultérieurement, le CDSP prit fin en 2003. Le public de Saint-Paul a quand même pu applaudir des spectacles des troupes en tournée suivantes : la Société culturelle de Mamowapik en 1994, l’école Maurice Lavallée en 1995, deux du Club dramatique de l’école Maurice-Lavallée en 1996, Alexis Roy (Alexis le Conteur) en 1998, le Théâtre de l’œil de Montréal en 2000 et L’UniThéâtre en 2001. Il y eut aussi des spectacles scolaires en 1992, 1997, 1999, 2001 et 2007. Ainsi à Saint-Paul il y eut au moins un spectacle par année entre 1992 et 2003.

À part Calgary, Edmonton et Saint-Paul, il y eut entre 1992 et 2008 deux spectacles en français à Ardrossan, 5 à Beaumont, 26 à Bonnyville, 5 à Cold Lake, 1 à Edson, 6 à Falher, 12 à Fort McMurray, 1 à Fort Saskatchewan, 1 à Girouxville, 10 à Grande Prairie, 1 à Inglewood, 1 à Jasper, 2 à Jean-Côté, 3 à Lac-La-Biche, 5 à Legal, 19 à Lethbridge, 2 à Mallaig, 2 à Medicine Hat, 12 à Plamondon, 4 à Red Deer, 8 à Rivière-La-Paix, 1 à Rocky Mountain House, 9 à Saint-Albert, 6 à Saint-Isidore, 3 à Saint-Vincent, 1 à Stony Plain, 1 à Sylvan Lake et 2 à Wainwright. En 2008, il n’y a eu du théâtre francophone qu’à Calgary, Cold Lake, Edmonton et deux tournées scolaires provinciales par le Théâtre la Catapulte d’Ottawa et le Théâtre la Seizième de Vancouver. Afin de mettre à jour les données à ce propos jusqu’en 2022, nous avons contacté par courriel les ACFA régionales de Lethbridge, Rivière-La-Paix et Saint-Paul. Celle de Saint-Paul a répondu (voir la note 29), celle de Rivière-La-Paix n’a pas répondu et nous avons appris de Mylène Beaulieu, la Directrice générale de l’ACFA de Lethbridge que celle-ci avait, depuis 2011, fait venir deux spectacles : Lettre d’amour présenté par le Théâtre à Pic de Calgary et La fille du facteur de L’UniThéâtre d’Edmonton. En plus, Sandrine Coronat, la directrice de l’École La Vérendrye, a ajouté que ses élèves de la 7e à la 12e avaient participé pendant plusieurs années au Festival de théâtre jeunesse (voir la section sur L’UniThéâtre, ci-après) et avaient gagné le 1er prix en 2003 avec la création collective, Agathe, et qu’il y avait eu des présentations dans le contexte scolaire, mais aucune communautaires. Ceci est un fait intéressant, parce que plusieurs des spectacles en région signalés ci-dessus étaient des pièces montées par des écoles qui avaient participé au dit Festival. Nous sommes donc portés à conclure qu’à part ce genre de théâtre et peut-être quelques présentations de troupes en tournée, il n’y a eu que très peu d’activité théâtrale francophone en l’Alberta régionale après 2008.

À Calgary, il y avait en 1992, deux troupes de théâtre actives : la Troupe des Avant-Cimes et la Société de Théâtre de Calgary. La Troupe des Avant-Cimes a présenté quatre spectacles en 1992 : Mort sur le Nil, Berthe et Rose en Floride, Et vive le suspense et Oublier. En 1993, elle a présenté Une soirée Tchekhov (trois de ses pièces), Faut placer Pépère et Bousille et les justes. Cette pièce a eu tellement de succès qu’elle a été reprise en 1994 par la même troupe qui a joué deux autres pièces, Topaze et L’Impromptu d’Outremont. Cette troupe semble s’être dissoute, parce qu’on ne trouve aucune autre référence à elle après 1994. Pour ce qui est de la Société de Théâtre de Calgary (STC), elle a présenté une pièce chaque année entre 1992 et 1994, notamment Albertine en cinq temps (1992), Piège pour un homme seul (1993) et Tournebire et malin frigo (1994). En 1995, la STC a présenté 3 spectacles, 2 en 1996, 3 en 1997, 5 en 1998, 2 en 1999, 1 en 2000 et 2001, 2 en 2002 et 2003, 2 en 2004 dont un monté par la Troupe des Jeunes de la STC, 1 en 2005 et 2 en 2006. Parmi les pièces jouées, notons La Mandragore (1995), Les Hauts et les bas d’une diva (1996), Old Orchard ? … Connais pas ! (1997), En camisole (1998), Encore une fois si vous le permettez (1999), Le Médecin malgré lui (2000), Échec et mat (2001), Le Malade imaginaire (2002), Le Temps des lilas (2003), Un homme au bord de la crise d’hormones (2004), Le Petit Prince de Saint-Exupéry dans une adaptation par Guy Robin, le directeur artistique de la STC (2005), et une soirée meurtre et mystère (2006). Il est également à noter que les 5, 12, 19 et 26 avril 1997, quatre pièces écrites par Gisèle Villeneuve ont été mises en ondes sur CHFA aux émissions « Au Café Chaud » et « Enfin le week-end ». Cette série appelée Les quatre saisons de Gisèle fut enregistrée à Calgary avec le réalisateur Paul Lamoureux et les coréalisateurs Dominique Roy et Ronald Tremblay. « Suite aux recommandations du rapport Marcus, la Société de Théâtre de Calgary est dissolue de sorte qu’on puisse ‘enterrer le passé’ (Marcus, 2007, p. 11) et explorer de nouvelles pistes menant à une restructuration complète de l’activité théâtrale à Calgary. Le RAFA est invité à nommer un ‘passeur théâtral’ qui, avec la collaboration de L’UniThéâtre, du RAFA et de l’ACFA régionale de Calgary s’emploiera ‘à développer à Calgary une programmation, riche et stimulante, à favoriser la création, la production, la diffusion et la consommation du produit théâtral’ (Marcus, 2007, p. 29). Inouk Touzin est nommée au poste. Une nouvelle étape s’amorce dans l’histoire du théâtre francophone à Calgary ». 

Avant d’aborder la suite, mentionnons que le public francophone de Calgary a pu profiter entre 1992 et 2008 de plusieurs spectacles présentés par des troupes en tournée :  le Cercle Molière de Saint-Boniface, Théâtre Quest et Cinquième Saison de la France en 1992 ; Théâtre de Galafronie de Belgique et Dynam O Théâtre du Québec en 1993 ; L’UniThéâtre en 1994 ; le Cercle Molière de Saint-Boniface en 1995 ; la Compagnie Crac de France, Le théâtre Loyal du Trac de Bruxelles et le Théâtre des Confettis du Québec en1996 ; L’UniThéâtre, le Théâtre du Gros Mécano et la Troupe Sénior de l’École Maurice-Lavallée d’Edmonton en 1997 ; deux spectacles des écoles de Calgary et le Cercle dramatique de Saint-Paul en1998 ; le Festival de théâtre étudiant en 1999 ; L’UniThéâtre en 2000 ;  les Étoiles Argentées de la FAFA et deux pièces des auteurs Roger Parent et Gilbert Bérubé en 2001 ; Marc Favreau (Sol) en 2002 ; le Cirque du Soleil et le RIRE en 2003 ; L’UniThéâtre et le Cirque du Soleil en 2004 ; L’UniThéâtre avec une pièce pour enfants par Isabelle Rousseau en 2005 ; Théâtre Jeunesse en tête en 2006 ; quatre spectacles de L’UniThéâtre et un de l’École de la Rose Sauvage en 2007 ; et le Théâtre de la Catapulte d’Ottawa et le Théâtre de la Seizième de Vancouver en 2008.

Après une première réunion le 21 mai 2009, une nouvelle troupe qui était une coopérative de théâtre francophone, le Théâtre à Pic (TAP), est née à Calgary, a célébré son inauguration le 17 juin 2009 et fut incorporée le 31 mai 2010. Elle était sous la direction artistique d’Inouk Touzin et co-fondée par lui et Marcia Mailloux. Elle présentait du théâtre professionnel et communautaire, des soirées d’improvisation et des ateliers scolaires. En 2010, cette troupe accueillait une coproduction de Les Médecins de Molière du Théâtre la Catapulte et du Théâtre français d’Ottawa. En avril 2011, elle a présenté une pièce communautaire, Ruzante et L’Ours, les deux comédies Ruzante d’Angelo Beolco et L’Ours de Tchekhov. En décembre 2011, elle accueillait L’UniThéâtre qui présentait Grace et Gloria. En avril 2012, la pièce communautaire Knock fut présentée et en octobre de la même année, une pièce professionnelle, Cowboy Poétré. Au début 2013, elle accueillait la troupe montréalaise, Bande Artistique, qui a présenté Parfois dans la vie les choses changent et en mars 2013, le TAP jouait Antigone en pièce communautaire. Lettres d’amour fut présentée à Calgary et à Lethbridge en février 2014, suivie par la pièce professionnelle Un Chapeau de Paille d’Italie en mars et Bouffe, une coproduction du Théâtre Populaire d’Acadie, Théâtre Satellite et Houppz Théâtre en novembre. L’Alliance française de Calgary a invité La Compagnie Théâtre des Hommes qui a joué Stupeur et Tremblement en février 2015 et le TAP a présenté une pièce communautaire, Évangéline Deusse, mise en scène par Guy Robin en avril. En octobre et novembre de la même année le TAP a accueilli Road-Movie Théâtre qui a présenté Le Chant de Georges Boivin de même que Les Voyagements – Théâtre de création en tournée avec Les 3 Exils de Christian E. et Le Long Voyage de Pierre-Guy B. L’année suivante, le TAP a fait la promotion de Souliers de sable présentée par Quest Theatre (en français et en anglais). En février 2017, le TAP a fait la promotion d’une soirée Meurtre et Mystère et a présenté sa dernière pièce communautaire, Le Malentendu en mai 2018. Lors d’une Assemblée Générale Extraordinaire le 9 octobre 2018 lorsque « le conseil d’administration a démissionné en bloc et un nouveau conseil a été formé, qui comprend, entre autres, Marcia Mailloux, cofondatrice revenue à la présidence et Inouk Touzin, cofondateur et directeur artistique[, le] Théâtre à Pic décide alors de prendre une année sabbatique pour revoir son développement stratégique, la structure de la coopérative, son financement et la distribution des tâches. » Lors de ce même AGE, Inouk Touzin a annoncé son départ de la fonction de directeur artistique, mais a demeuré comme consultant afin d’assurer une continuité. Pour sa part, Marcia Mailloux a constaté que « la manière qu’on avait construit la compagnie, que la structure interne et administrative demandait beaucoup trop de ressources, et que ça ne fonctionnait pas. » Elle ajoute « Je crois que ça a été un succès d’avoir gardé une coopérative de théâtre francophone pendant 10 ans, ici à Calgary. Nombreuses sont les entreprises qui ferment après deux ans, alors oui, ça a été un succès. » Nous ne pouvons que souhaiter une reprise rapide et fructueuse de l’activité théâtrale francophone à Calgary.     

Avant de passer aux descriptions des troupes encore actives en Alberta, il convient de mentionner qu’il y a eu plusieurs personnes vivant en Alberta qui y ont écrit des pièces de théâtre en français. Nous avons déjà mentionné Gilbert Bérubé, Manon Beaudoin, Claude Binet, Pierre Bokor, Christine Dimitriu Van Saanen, Laurier Gareau, Marie-France Hébert, Suzette Lagacé-Aubin, Gisèle Lemire, France Levasseur-Ouimet, Roger Parent, Isabelle Rousseau, André Roy, Suzanne Schmouth, François Tardif et Gisèle Villeneuve. À ceux-ci s’ajoutent Denis-Martin Chabot, Charles Chenard, Sophie Gareau-Brennan, Mélissa Masse, François Pageau, Guy Pariseau, Joëlle Préfontaine, Bernard Salva, Jocelyne Verret Chiasson, les participants aux créations collectives de la troupe RIRE de même que les auteurs des pièces présentées en lecture publique lors des soirées À Haute voix et Parté. En 2014, Brian Dooley a initié les lectures publiques de dramaturges inédits albertains, soirées nommées À Voix haute, dans le cadre des saisons théâtrales de L’UniThéâtre. Les auteurs des pièces qui y ont été présentées, par ordre de présentation, sont : Pierrette Requier, Donia Mounsef, Isabelle Rousseau, Danièle Petit, Renée Bouchard, Alodie Larochelle, Pascale Nadon, Julia Seymour, Émilie Duchesne, Sophie Gareau-Brennan, Robert Suraki Watum, Josée Thibeault, Valécia Pépin, Paula Humby, Kenneth Brown traduit par Pierrette Requier, Sarah-Jeanne Bélec, Mélissa Masse et Joëlle Préfontaine. Quelques-unes de ces pièces ont été présentées au grand public dans des saisons régulières de L’UniThéâtre, notamment Récolte de Joëlle Préfontaine, La Fille du facteur de Josée Thibeault qui est aussi allé en tournée, Pins de Julia Seymour et Élise contre l’extinction totale de Paula Humby qui a fait la tournée des écoles. Lorsque Joëlle Préfontaine est devenue directrice artistique de L’UniThéâtre, elle a créé en 2019, en collaboration avec le Centre d’art visuel de l’Alberta (le CAVA), le Centre de développement musical (le CDM) et la troupe de danse La Girandole, des soirées intitulées Parté qui incorporaient des lectures publiques de pièces (À Voix haute), des spectacles musicaux et de la danse et qui étaient présentés au CAVA. Les noms des auteur-e-s des pièces ou des extraits de pièces lus dans ces Parté sont : Émanuel Bubbeldam, Malaïka Ogandaga, Mireille Rijavec, Anna Ally, Pascale Nadon et Alodie Larochelle. Clairement, il y a eu une profusion de dramaturges ces derniers temps au moins en partie grâce aux ateliers d’écriture, La Parole parlante, qui a fait partie, depuis peu après ses débuts, des activités connexes de L’UniThéâtre.

Nous passons maintenant aux troupes encore actives en 2022.

« Théâtre à l’Ouest est la troupe d’étudiants du Campus Saint Jean depuis 2004. Son directeur artistique est depuis cette date Bernard Salva, comédien, metteur en scène et professeur de théâtre au Campus. Elle accueille aussi chaque année quelques non-étudiants ou anciens étudiants du Campus. Le mandat de Théâtre à l’Ouest est à la fois pédagogique et artistique.

« Sur le plan pédagogique, proposer aux étudiants un expérience de vie en équipe de qualité lors de leur passage au Campus Saint Jean, au service d’un art, le théâtre, présent depuis le début de l’histoire du Campus. Mettre en valeur aussi la variété culturelle et sa richesse dans la provenance des étudiants inscrits. Notre troupe est certainement la plus multiculturelle d’Edmonton. Elle recherche avant tout la convivialité, le plaisir de créer ensemble en langue française. Un théâtre au pluriel qui se veut ludique et rigoureux, accompagné par plusieurs artistes expérimentés.

« Sur le plan artistique, explorer un théâtre du verbe mais également visuel et charnel. Mettre en valeur un ‘théâtre/Monde’, à la fois local et international, axé avant tout sur des auteurs aux écritures exigeantes issus principalement de la francophonie canadienne et mondiale.

« Ainsi la troupe s’est signalée au fil des ans par des productions très collectives, aux textes puissants mais avec un soin apporté aussi à des scénographies minimalistes et bandes sons imaginatives. Citons entre autres : Dalia une odyssée (2013) de Bernard Salva, pièce qui a voyagé, travaillée aussi dans des universités et lycées libanais, américains et français ; La réunification des deux Corées (2017) de Joel Pommerat avec une scénographie originale bi-frontale frôlant le spectateur et proposant une scène comme un ring ; Persepolis (2019), adaptation audacieuse de la bande dessinée de Marjane Satrapi. »

La troupe, « Les Productions du Garage, a commencé en 2004 lorsque Gilles Denis et moi [André Roy] voulions monter des spectacles. Mon garage était donc le seul endroit pour répéter. Depuis lors, nous avons produit de nouveau Il était une fois Delmas … mais pas deux fois, une composition de Claude Binet et moi des années 90. J’ai également écrit Les Confessions d’un collégien ainsi que La Sainte Flanelle. Nous avons monté également une dizaine de pièces écrites par France Levasseur-Ouimet, dont Les Inséparables, Par Amitié, Saint-Albert, L’intimidation, ça me concerne, ainsi qu’une production en anglais, Everything is Beautiful, une version anglaise de Prends mes yeux, tu vas voir. Les Productions du Garage a fait de la tournée avec plusieurs spectacles en Alberta, Saskatchewan, Manitoba et Ontario. C’est une des raisons pour lesquelles nous sommes seulement deux…c’est plus facile à se déplacer. »

La Troupe, RIRE ou RiRe, créée par Ève Marie Forcier et ses collègues à Radio-Canada et des ami-e-s, a présenté annuellement depuis 1994 une revue humoristique qui révèle des événements albertains ou qui ont affecté les Albertain-e-s en les présentant pour faire rire le spectateur, un peu à l’instar de l’émission « Bye-Bye … » diffusée la veille du Jour de l’An sur les ondes de Radio-Canada télévision qui, elle, se moque d’événements québécois. Le spectacle du RIRE est enregistré et rediffusé à la radio de Radio-Canada à Edmonton la veille du Jour de l’An. Le spectacle de 1994, intitulé La 8760ième HEURE, était joué par Claude Bernatchez, Mario Deschamps, Martin Flibotte, Ève Marie Forcier, François Pageau, André Roy et Patrick Thibaudeau. Celui de 1995 s’intitulait RIRE D’EUX. Depuis 1996, le RIRE est présenté au théâtre de la Cité francophone à Edmonton et quelques fois à la Fête franco-albertaine. « Pour l’édition 1996, Mario Deschamps, Ève Marie Forcier, Lise Nepton et Jean-François Porlier interprètent des textes d’Ève Marie Forcier, Marie Lavoie, François Pageau et Ronald Tremblay dans une rétrospective … intitulée Jamais rire sans trois. Par la suite de nombreux artistes participeront aux spectacles annuels incluant, outre ceux et celles déjà mentionnés, Mario Cyr, Christine Dallaire, Daniel Cournoyer, Frédéric Towner Sarault, Manon Beaudoin, Marc Traversy-Larivière, François de Merlin, Lise Villeneuve, Patrick Spears, Pierrette Jutras, Josée Thibeault, Eric Thibeault, Laulie Savard, Mélanie Carroué, Ginette Leblanc, Eric Sirois, Guillaume Bois, Caroline Thibault, Patrick Henri, Cathia Riopel, Steve Jodoin, Vincent Forcier et plusieurs autres, sans parler des musiciens dont Robert Walsh, Jason Kodie, Michel Godbout, Joël Lavoie et d’autres. La neuvième édition du spectacle, Un Rire tout 9 !, sera aussi présentée à Calgary le 20 décembre 2003. » Après son spectacle en 2015, la troupe du RIRE a pris congé, mais est revenue le 30 décembre 2020 avec un spectacle intitulé Le Rire aussi c’est contagieux qui a été filmé au théâtre Varscona et diffusé sur le web. Pour cette production, « … Vincent Forcier, Steve Jodoin, Katrine Deniset, mais aussi Isael (sic) Huard (concepteur de son) et Éric Doucet (musicien) ont joint Josée Thibeault sur les planches… ». L’édition suivante, 2021 : LE CODE QRIRE, a été présentée les 3 et 4 décembre 2021 au théâtre de la Cité francophone à Edmonton avec les créateurs/interprètes Josée Thibeault, Marie-Joanne Fogue Makou, Steve Jodoin et Vincent Forcier.

La troupe des aînés, Les Étoiles Argentées, a été fondée par France Levasseur-Ouimet en 1999-2000 « grâce à la vision d’Hélène Lavoie qui était alors la présidente de la Fédération des aînés franco-albertains. » Depuis le début, France est l’auteure et la metteure en scène des pièces jouées par cette troupe. « Dix ans plus tard la troupe des aînés aura monté sur les planches à Edmonton, à Legal, à Bonnyville, à Calgary, à Saint-Albert, à Beaumont, à Falher, à Saint-Isidore, à Plamondon et à Saint-Boniface : 33 représentations en tout devant plus de 6 500 spectateurs. J’aurai eu le plaisir de leur écrire neuf pièces dont une comédie musicale à grand format, un meurtre mystère et plusieurs comédies. De manière générale, les distributions sont importantes se chiffrant de 6 à 26 comédiens âgés de 50 à 91 ans. Les textes sont normalement d’une durée de 90 minutes que les gens apprennent par cœur.                                                  « En 2007, six régions (Edmonton, Calgary, St-Paul, Bonnyville, Legal, St-Isidore) ont participé à une même production intitulée Pour l’amour d’un piano. Écrite de manière à permettre aux régions de travailler seules dans un premier temps, la metteure en scène a ensuite assuré les répétitions dans chaque région pour enfin regrouper tout le monde lors de deux grandes répétitions générales. La distribution réunissait 26 comédiens et la pièce a été jouée devant plus de 500 personnes. »

« Il ne faudrait pas oublier une autre pièce que France a écrite, Prends mes yeux, tu vas voir. Selon son auteure, cette pièce a été écrite et mise en scène en 2007-08 à la demande de la Fondation canadienne pour le dialogue des cultures. La pièce devait développer les thèmes du vieillissement… La pièce a été jouée par cinq différentes troupes d’aînés au Canada lors des Rendez-vous de la francophonie en mars 2008 : Théâtre de l’Île (QC) a fait la tournée des Maritimes ; L’Atelier théâtral des alentours (NB) a fait la tournée au Québec et en Ontario ; Un groupe local a fait la tournée à Chéticamp et à l’Île Madame ; ScènOntario a fait la tournée de l’Ouest ; et La troupe du Grand Salon (Alberta) avec les interprètes René Aubin, Gilles Denis et Juliette Richard … a fait la tournée au Québec. La pièce a été jouée dans plus de 50 écoles secondaires, dans des centres d’aînés et dans des hôpitaux. »                                                                                 

  Les Étoiles Argentées n’aimaient pas le nom, alors la troupe est devenue L’Ensemble des sages probablement vers 2002-2003. Depuis 2010 cette troupe a présenté à l’auditorium du Campus Saint-Jean les pièces suivantes toutes écrites et mises en scène par France : Réceptioncélesste.com (2011-2012) – 17 comédiens ; Qui a tué la tante Anna ? (2012-2013) – 15 comédiens ; Le bon parti (2013-2014) – 13 comédiens ; Le 15e anniversaire (2014-2015) – 26 comédiens ; Quel matin ! (2015-2016) – 25 comédiens ; Le sac à main (2016-2017) – 17 comédiens ; Le Patio communautaire (2017-2018) – 18 comédiens ; Miss théâtre aîné (2018-2019) – 22 comédiens ; et La preuve (2021-2022) – 13 comédiens. La troupe fait partie du Plaisir d’apprendre depuis 2006 et elle vit de ses propres fonds recueillis à la porte. « La troupe n’a pas toujours les mêmes comédiens bien qu’il y ait un petit groupe qui revient chaque année. Cela fait en sorte que de 1999 à ce jour quelques 135 comédiens ont participé à la troupe, la majorité d’entre eux étant des débutants. Les pièces ont toujours un bel éclairage (Witold Kurpinsky) et un beau décor (André Roy). »

Depuis sa fondation à Edmonton en juin 1992, L’UniThéâtre a eu sept directeur-trice-s artistiques : Guylaine Normandin (1992 – 1996), Jean-Pierre Gonthier (pendant quelques mois en 1996), Daniel Cournoyer (1996 – 2012), Brian Dooley (2012 – 2018), Joëlle Préfontaine (2018 – 2020), Vincent Forcier (2020 – 2021) et Steve Jodoin (par intérim depuis la fin 2022). « …, L’UniThéâtre entame sa première saison en rendant hommage aux artisans du théâtre francophone en Alberta. Intitulé 25 ans de théâtre français en Alberta, ce spectacle-collage est présenté à la Faculté Saint-Jean en décembre 1992. » En février 1993, la pièce Un Millier d’oiseaux a été présentée à l’École Maurice-Lavallée et a fait la tournée des écoles françaises et d’immersion. « L’UniThéâtre participe ensuite au 1er Festival d’hiver d’Edmonton avec Faits d’hiver de François Pageau, une pièce pour jeunes présentée au Centre culturel Bonnie Doon en mars 1993. » En avril 1993, L’UniThéâtre a terminé sa première saison avec Bureau de la minorité, bonjour! de France Levasseur-Ouimet, présentée à l’auditorium du Campus Saint-Jean. En mai 1993, L’UniThéâtre continue à s’occuper du festival annuel de théâtre jeunesse en organisant le IVe Festival de Théâtre jeunesse de l’Alberta au Campus Saint-Jean. Pendant sa deuxième saison, il y a eu un spectacle communautaire, une pièce pour enfants qui a fait le tour des écoles et une collaboration avec le Théâtre à la Carte. Sa troisième saison a consisté en deux spectacles communautaires, une pièce professionnelle pour enfants qui est allée en tournée et une pièce du Cercle Molière de Saint-Boniface. Pour débuter sa quatrième saison, L’UniThéâtre a présenté en octobre 1995 la pièce La Génération Velcro de Gisèle Villeneuve. Cette pièce est aussi allée en tournée à deux communautés dans la région de Rivière-La-Paix. Il y aura ensuite deux pièces communautaires en février et mars 1996, puis une lecture publique d’une pièce de Marcel Martin pour finir la saison en avril. Jean-Pierre Gonthier a pris la direction de L’UniThéâtre en août 1996, mais il devra quitter le poste quelques mois plus tard. Daniel Cournoyer, qui avait été l’assistant de Guylaine, a alors pris la direction en décembre 1996, mais la cinquième saison avait déjà débuté en novembre avec la pièce La Céleste Bicyclette jouée par Alberta Millaire au théâtre Roxy. 

Le théâtre de la Cité francophone a été inauguré en décembre 1996 avec une pièce de la troupe RIRE et ce sera la scène attitrée de L’UniThéâtre depuis. Pendant le mandat de Daniel Cournoyer, L’UniThéâtre est devenu membre des organismes suivants : Regroupement artistique francophone de l’Alberta, Association des compagnies de théâtre de l’Ouest (qui regroupe au moins L’UniThéâtre d’Edmonton, Théâtre la Seizième de Vancouver, Troupe du Jour de Saskatoon et Théâtre Cercle Molière de Winnipeg), Association des théâtres francophones du Canada (17 compagnies réparties en six provinces), Centre des auteurs dramatiques, Conférence canadienne des Arts, Professional Arts Coalition of Alberta, Edmonton Arts Council, Theatre Alberta, Alberta Playwrights Network et Le Conseil de développement économique de l’Alberta. Aujourd’hui, nous pouvons ajouter à cette liste : Réseau des grands espaces, Les Voyagements (le théâtre en tournée), Coalition des femmes de l’Alberta et Touring Alliance of Alberta. À travers les années, il y a eu plusieurs échanges entre les troupes de l’Ouest de sorte que pendant une saison théâtrale, L’UniThéâtre pouvait, par exemple, monter un ou deux spectacles qu’il pouvait présenter dans les autres villes (Vancouver, Saskatoon et Winnipeg) et compléter sa saison, incluant une pièce pour jeune public en accueillant quelques-unes des autres troupes de l’Ouest ou encore monter des spectacles en collaboration avec une ou l’autre de ces troupes. Ainsi, Daniel Cournoyer a établi une routine de sorte que chaque saison théâtrale comptait trois pièces professionnelles, une pièce communautaire et une pièce professionnelle pour jeune public qui faisait la tournée dans au moins deux provinces de l’Ouest. Cette habitude s’est perpétuée pendant les mandats de Brian Dooley et de Joëlle Préfontaine sauf que la dernière pièce de la saison 2020-2021 a dû être annulée à cause de la COVID-19. Plus récemment, il n’y a une pièce communautaire qu’aux deux ans, il y a trois pièces professionnelles et la tournée de la pièce pour jeune public se limite à l’Alberta et la Colombie-Britannique.  

Pour célébrer son dixième anniversaire, L’UniThéâtre a créé le Prix Laurent, en honneur de la contribution de Laurent Godbout au domaine théâtral. Ce prix est pour reconnaître et honorer des personnes qui ont contribué de façon spéciale au théâtre francophone en Alberta. Le premier Prix Laurent fut décerné à Suzette Lagacé-Aubain en tant que fondatrice de la Boîte à Popicos et à Réginald Bigras en tant que fondateur du Théâtre Français d’Edmonton. Réginald fut représenté lors de la cérémonie par France Levasseur-Ouimet. Rappelons que l’unification de ces deux troupes a créé L’UniThéâtre. En 2004, c’est Manon Beaudoin qui a reçu ce prix. Lors du 25e anniversaire de L’UniThéâtre, le Prix Laurent a été décerné à France Levasseur-Ouimet. « En janvier 2016, L’UniThéâtre et le département de langues modernes et d’études culturelles (MLCS) de l’Université de l’Alberta lançaient un nouveau projet ayant comme objectif d’enrichir l’expérience pédagogique des étudiants de l’Université de l’Alberta et du Campus Saint-Jean en les incitant à assister à des pièces de théâtre en français. Ce prix porte le nom de professeur (sic) Louise Ladouceur du Campus Saint-Jean. Louise Ladouceur a contribué énormément à L’UniThéâtre au cours de plusieurs années. La professeur (sic) d’études théâtrales fut responsable de l’instauration des surtitres à L’UniThéâtre et depuis, cet outil permet aux apprenants de la langue française et les francophones d’assister à nos pièces et de mieux comprendre et saisir les nuances des pièces qu’ils voient. Le Prix Louise Ladouceur vise à inspirer les apprenants de la langue et les encourager à améliorer leurs compétences linguistiques en écrivant la critique théâtrale d’une pièce de L’UniThéâtre. Les critiques soumises par les étudiants sont évaluées par un jury composé de membres de l’Université de l’Alberta et de L’UniThéâtre. »

Depuis son début, L’UniThéâtre organise chaque année pendant une fin de semaine le Festival théâtre jeunesse de l’Alberta. Ce festival a eu lieu depuis plusieurs années à Kananaskis dans les Rocheuses et regroupe des troupes des écoles francophones et d’immersion de la septième à la neuvième année et de la dixième à la douzième année. Lors de la fin de semaine, en plus d’une multitude de performances, les jeunes profitent d’activités et d’ateliers liés au théâtre et donnés par des artistes-éducateurs. Des trophées, des médailles et des plaques sont remis aux gagnants. C’est grâce en partie à ce festival qu’il continue à y avoir du théâtre en région, parce que, souvent, les troupes gagnantes présentent leurs pièces dans leur localité. Ainsi L’UniThéâtre assure indirectement une présence du théâtre francophone partout en province.

« L’UniThéâtre œuvre à former la relève dramatique d’expression française en Alberta en offrant trois étapes de création et de développement des textes. La Plume parlante, cercle d’écriture, se rencontre une fois par semaine. L’UniThéâtre offrira aux participants quelques ateliers menés par des artistes professionnels au cours de la saison. » Nous avons déjà mentionné les autres activités connexes de L’UniThéâtre, À Haute voix et Parté. « En collaboration avec le Centre de développement musical et l’Association La Girandole, L’UniThéâtre présente chaque été le Camp Multi-Arts. Ce camp de jour de deux semaines offre aux jeunes de la 1e à la 7e année des ateliers de danse, de musique, de théâtre, et d’arts visuels, le tout se terminant avec une présentation d’un spectacle créée par les participants. » Évidemment, le Festival et ces autres activités ont été suspendus pendant la pandémie.

« Parmi ses plus grands succès récents, on trouve Cowboy Poétré, une création de Kenneth Brown, d’après une idée originale de Daniel Cournoyer. Cette pièce a été présentée lors du ‘Festival Zones Théâtrales’ du Centre national des Arts à Ottawa et a connue un succès phénoménal. La pièce a aussi été en tournée en Alberta et fut présentée, sur invitation, au théâtre Populaire d’Acadie à Caraquet et au Théâtre L’Escaouette à Moncton, au Nouveau-Brunswick. En 2007, la pièce Fort Mac, de Marc Prescott avec une mise en scène de Daniel Cournoyer, fut présentée à Ottawa au ‘Festival Zones Théâtrales’ et à Montréal au Théâtre Denise Pelletier. La pièce a remporté un succès fulgurant à Montréal, [et] des salles comblées, des spectateurs enthousiasmés par le récit, de nombreux rappels et des critiques positives ont confirmé le succès qu’a remporté cette production albertaine. Après un franc succès dans l’Est du pays, Fort Mac fil la tournée en Alberta. La pièce fut présentée à Lethbridge, Calgary, St-Isidore et Cold Lake. En 2013, L’UniThéâtre fut récipiendaire de la plus haute distinction des Prix Elizabeth Sterling Haynes pour ‘Contribution exceptionnelle au théâtre à Edmonton.’ » Il ne faudrait pas oublier les deux comédies musicales écrites et dirigées par France Levasseur et qui étaient les pièces communautaires en 2000, Les élections et 2002, Au ciel, au ciel, au ciel ! qui ont été jouées devant des salles combles et ont eu de grands succès !

Si une lectrice ou un lecteur consulte l’onglet « Archives » sur le site web, lunitheatre.ca, pour apprendre quelles pièces ont été présentées par L’UniThéâtre, sachez que ces archives ne remontent qu’à la saison 2016-2017 et il convient d’ajouter Moi, Monsieur, Moi aux titres indiqués dans cette saison, Perception, La Raccourci et Bello. À la saison 2017-2018, ajoutez Bibish de Kinshasa et Tempus Extraordinarius à Les Neiges et En mémoire de moi. À la saison 2018-2019, ajoutez Ma Irma, Élise contre l’extinction totale et Fabula-fabulis à Billy (Les jours de hurlement et La Fille du facteur. En 2019-2020, Madame Catherine a été présentée en plus de Simone et le whole shebang et Les Belles-Sœurs, tandis que Martine à la plage a été annulé en raison de la pandémie.

Pendant la saison 2020-2021, lors de la pandémie, L’UniThéâtre a présenté trois spectacles en mode virtuel, Une soirée avec Lucy Darling en février 2021, La Boîte sensorielle en mars 2021 et une adaptation par Vincent Forcier de la pièce En attendant Godot de Samuel Beckett, renommée Une exploration : En attendant en juin 2021. Lors de sa saison 2021-2022, L’UniThéâtre a présenté Pins de Julia Seymour dans le théâtre de la Cité à l’automne 2021, 2021 : Le Code QRIRE, déjà mentionnée, au même endroit en décembre 2021, Le Merveilleux voyage d’Inès de l’Ouest de Rébecca Dérape au théâtre de la Cité au début mai 2022 et, en collaboration avec le Théâtre de la Seizième de Vancouver, elle a fait la tournée dans les écoles en avril et mai 2022. Art de Yasmina Reza a été jouée au Gateway Theatre au début juin 2022 dans une mise en scène de Josée Thibeault et les interprètes bien connus et appréciés, Steve Jodoin, François Pageau et Bernard Salva.

Il va sans dire que la pandémie a vraiment été une cause majeure du déclin de l’activité théâtrale francophone en Alberta, surtout pendant ces deux dernières années, mais nous devons constater également que le seul endroit où cette activité, si peu soit-elle, a été produite est à Edmonton. Nous ne pouvons qu’espérer que le moment est venu pour entamer une marée montante de cette activité et nous souhaitons « MERDE » à celles et ceux qui y contribueront.

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Laurent Godbout à Edmonton, Alberta, le 20 juin 2022

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